CARNET DE L’AMATEUR


24 March 2023

10 choses à savoir sur la paire de commodes de la chambre de Louis XIV au Grand Trianon

Connaissez-vous vraiment l’œuvre de Charles-André Boulle ? Son travail, repris, copié, pastiché ad nauseam sous Napoléon III, fait date dans l’histoire du meuble. Nous vous emmenons aujourd’hui dans les coulisses d’une de ses œuvres clé, les commodes de la chambre du Roi au Grand Trianon, en vous faisant découvrir 10 choses à retenir sur cette paire.


1 - Il s’agit des premières commodes de l’Histoire ! Plus précisément, ces commodes sont les premières documentées comme telles, mais elles ne sont pas les premières réellement existantes. Les premières commodes sont jusqu’alors désignées sous le terme de « bureau », ou « bureau en commode », dont elles sont directement héritées.

2 - La provenance des commodes est parfaitement traçable ! Il s’agit d’un élément rare pour un meuble. Livrées en 1708 et 1709 pour la chambre du roi au Grand Trianon, leur présence y est encore attestée en 1769 (Inventaire du Grand Trianon, 1769), puis en 1776, 1787 et 1789. Elles partent en 1790 pour le Garde-Meuble de Paris, pour ensuite prendre la direction de la Bibliothèque Mazarine vers 1795. La bibliothèque les mit en dépôt en 1932 au château de Versailles qui les a maintenant réintégrées à ses collections.

3 - Les formes galbées, qui s’éloignent des commodes dites « mazarines » encore répandues, sont tout à fait nouvelles pour l’époque et annoncent les commodes en tombeau.

4 - La paire de commodes, ayant appartenue au XIXe siècle à la Bibliothèque Mazarine à Paris, fut, par abus de langage, surnommée paire de « commodes Mazarines ».

5 - Le galbe de cette commode ne suit encore qu’un mouvement vertical. Les premières commodes au double mouvement galbé, vertical et horizontal, n’apparaissent qu’après 1725.

6 - L’ingéniosité de Boulle se voit sur le piètement de la commode constituée de huit pieds, et disposée de telle sorte que le meuble semble se répartir sur quatre pieds, comme il sera d’usage par la suite. Nous assistons ici à la transition des codes mobiliers XVII à ceux XVIIIe siècle.

7 - Les bronzes tout à fait exceptionnels occupent la double fonction décorative et préventive. Ils sont en effet situés à des endroits exposés du meuble (angles, pieds) qui sont ainsi protégés. Boulle est d’ailleurs l’un des pionniers dans l’utilisation du bronze d’ornementation, qu’il faisait lui-même.

8 - La marqueterie Boulle, cette technique d’incrustation de laiton ou de cuivre sur écaille, du nom de l’ébéniste, n’est pas inventée par ce dernier, mais apparaît tout d’abord en Allemagne. Cependant, André Charles Boulle pousse cette technique à sa perfection, ce qui explique que la postérité ait associé son nom à ce savoir-faire. Les deux commodes de la chambre du roi font partie des rares attributions certaines d’un meuble au corpus de Charles-André Boulle.

9 - Il est amusant de relever la présence de figures de sphinges aux angles du meuble. La Sphinge, cette créature mi-femme, mi-bête, se donna la mort par rage, lorsqu’Œdipe réussit à résoudre l’énigme qu’elle posait aux habitants de Thèbes. Sa figure est associée à celle de la mort et du tombeau où elle envoyait les Thébains qui échouaient à son énigme. Sa présence sur ce meuble qui préfigure les commodes-tombeau est à relever.

10 - La paire de commodes est exposée au Château de Versailles au salon de l’Abondance.

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