CARNET DE L’AMATEUR


10 March 2023

Les Collections de Madame de Pompadour

Mécène des Arts, la marquise de Pompadour a su faire passer ce trait de sa personnalité à la postérité au travers d’une iconographie soigneusement préparée. A titre d’exemple, il suffit de se référer au portrait réalisé par Quentin de la Tour, qui en dit long tant sur les qualités de l’artiste que sur les centres d’intérêts de sa commanditaire. Celle-ci se fait représenter en véritable soutien des Idées de son époque qui font briller la France en Europe, entourée des attributs des arts, des sciences et des lettres. Les différents peintres, de manière logique, campent donc autour de Madame de Pompadour, née Jeanne-Antoinette Poisson, des pièces meublantes attribuées aux plus grands noms de la période. BVRB, Migeon, Dubois, voient leurs noms associés à la marquise, qui affectionnait particulièrement leur travail. Les archives du marchand-mercier Lazare Duvaux, son fournisseur attitré, nous apprennent encore que la marquise était son deuxième client, supplantée uniquement par le roi lui-même. La marquise de Pompadour, dont une partie des meubles sont identifiables grâce aux inventaires de plusieurs de ses châteaux, a eu une influence telle dans le goût de la décoration de son temps qu’on parle aujourd’hui d’un style pompadour ; nous désignons par cela un style s’éloignant de la surcharge Rocaille sans se départir de la légèreté de ses courbes.

Elle est également la protectrice de la manufacture de Sèvres. Celle-ci est installée au pied de son château de Bellevue, et attire son attention ; c’est à son instigation que le roi élève la manufacture au rang de manufacture royale. La Marquise favorise l’élaboration de services en porcelaine, au détriment des services en or et argent. Ce matériau connaît un essor considérable dans le domaine de l’ornementation, en mettant en vogue le bleu céleste, le rose (ce qui donne lieu à l’expression inexacte de « rose pompadour »). On dénombre dans son inventaire après décès pas moins de 3000 pièces de porcelaines, d’ailleurs seul domaine où la marquise ait constitué une véritable collection où ancien et moderne se mélangeaient.  

 Mais si l’on constate que Madame de Pompadour soutient les artistes français en leur passant commande, elle n’échappe tout de même pas à l’engouement collectif pour les objets asiatiques revisités à l’européenne. C’est ainsi qu’elle commande en 1752 une paire de girandoles en bronzes montés sur des porcelaines représentant des grues du Japon. Ce rare objet témoigne de son goût éclectique mais aussi très sûr, qui nous permet aujourd’hui d’apprécier en un même objet la synthèse de deux univers. C’est en réponse à cet intérêt toujours croissant pour l’art oriental et les laques que la dynastie des Martin, vernisseurs parisiens, mettent au point une technique d’imitation des matériaux asiatiques. Madame de Pompadour collectionnera plusieurs meubles de cette facture, dont un secrétaire en pente à vernis martin bleu, aujourd’hui conservé au Musée des Arts Décoratifs. La combinaison d’objets venus de tous les axes commerciaux est d’ailleurs tout à fait représentative de la démarche suivie par la marquise dans ses achats. Elle ne collectionnait pas en effet un certain type d’objets en particulier, mais achetait au gré de ses besoins décoratifs une production contemporaine. Ses intérieurs sont donc le reflet de son souci de la décoration, qui donne place à des univers très luxueux, où les matières et les provenances rivalisent d’exotisme et de qualité.

La Marquise de Pompadour ne s’est pas contentée de collectionner le travail des autres, elle s’est elle-même essayé à la création artistique, par la pratique de l’art des camés qu’elle sculptait et gravait elle-même. L’art de la glyptique, gravure sur pierres fines, est en vogue au milieu du XVIIIe siècle français. Madame de pompadour a son artiste attitré, Jacques Guay, qui devient également son maître. Elle nous laisse deux camés signés de sa main, pour lesquels il semblerait que Guay ait grandement contribué.

La Marquise de Pompadour, par ce rôle de mécène, joue un rôle important dans les arts décoratifs du XVIIIe siècle, dont elle encouragea les développements, les innovations, par un intérêt qui ne s’est jamais démenti.

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