CARNET DE L’AMATEUR


30 December 2021

L’incroyable progéniture du duc de Bouillon, premiers enfants de l’Hôtel de Bouillon

Le 20 avril 1662 Godefroy Maurice de la Tour d’Auvergne, duc de Bouillon épouse Marie-Anne Mancini. De leur union naissent dix enfants, cinq fils et cinq filles. 

Louis-Charles de La Tour d’Auvergne (1665-1692)
Premier enfant du duc et de la duchesse de Bouillon, il est destiné à reprendre le titre de son père ainsi que sa fonction de Grand Chambellan. Homme intellectuel et militaire, il rédige à l’âge de quatorze ans une thèse philosophique et la soutient au collège des Jésuites de Clermont-Ferrand en 1679.
En 1685, accompagné de deux de ses cousins, Louis-Armand de Conti et François-Louis de La Roche-sur-Yon, il demande à Louis XIV l’autorisation de prendre les armes sous les ordres du roi de Pologne, Jean III Sobjeski, avec qui ils partent combattre les Turcs en Hongrie du Nord. Mais un courrier à leurs noms est saisi à Strasbourg, contenant plusieurs pamphlets de cour à l’encontre de Louis XIV. A son retour en France Louis-Charles est donc exilé. Il trouve alors refuge en Italie où il s’engage dans l’armée vénitienne. Il obtient le pardon du roi en 1690 et rentre en France. Le retour marque ses débuts à la charge de Grand Chambellan du roi, fonction qui lui est destinée à la mort de son père. Il se marie également, le 22 février 1691, à Anne-Geneviève de Lévis-Ventadour (1673-1724), mais aucun enfant ne naît de cette union. Grâce à cette alliance, il reçoit la seigneurie de Roberval qui entre alors dans la Maison de la Tour d’Auvergne. Nommé brigadier de cavalerie le 3 juillet 1692, Louis-Charles part faire la campagne des Flandres, où il est blessé en août, à Steinlergue, par un coup de mousquet qui lui est fatal.


Marie-Elisabeth (1666-1725)
Seconde enfant du duc et de la duchesse de Bouillon, Marie-Elisabeth se mêle à la cour de son temps et se lie de la sorte avec la duchesse de Bourgogne, faisant ainsi parti de l’entourage du roi. La jeune fille montait à cheval et participait aux chasses royales. Jamais mariée, elle entretient avec son père d’excellents rapports, contrairement à ses frères. On raconte que sa mère en était jalouse. Elle prit soin de son père jusqu’à la mort de ce dernier en 1721, qu’elle ne tarda pas à rejoindre dans la tombe en 1725. 

Emmanuel-Théodose (1668-1730)
Promis à la vie consacrée et présenté à Rome au Saint-Père, la mort subite de son frère ainé fait d’Emmanuel-Théodose l’héritier de la Maison. Désormais destiné à une prestigieuse carrière militaire, il commence sa formation en Italie, avant de la poursuivre en Allemagne. A la mort de son père en 1721, il prend alors le titre de duc de Bouillon et devient le nouveau grand Chambellan. Il est également élevé au rang de pair de France.  
Bien qu’il ait hérité du titre et de la fonction de son père, Godefroy Maurice de La Tour d’Auvergne, son fils Emmanuel-Théodose n’avait pas une bonne relation avec lui. En effet, après avoir découvert le testament de l’un de ses ancêtres stipulant que « l’ainé des enfants de la famille a de plein droit la propriété des biens héréditaires, le père n’en étant plus que l’usufruitier. », Emmanuel-Théodose mène la vie dure à son père. D’après Saint-Simon il va jusqu’à intenter un procès au duc de Bouillon, l’accusant d’empêcher son fils d’user de ses droits d’héritier. Proche de Louis XIV, son père fait appel au roi afin que l’affaire soit étouffée.
Emmanuel-Théodose se marie quatre fois. Son premier mariage a lieu durant l’année 1696 avec Marie-Armande-Victorine de La Trémoille (1677-1717), qui lui donnera huit enfants dont son héritier, nommé Frédéric-Maurice-Casimir (1702-1723). A la mort de sa première femme, il se remarie trois fois, d’abord avec Louise-Françoise-Angélique Le Tellier (1700-1719) qu’il épouse en 1718, puis Anne-Marie-Christine de Simiane (✝︎ 1722) en 1720, et enfin, Louise-Henriette-Françoise de Lorraine (1707-1737). Chacune de ses épouses lui donnera un enfant. Voltaire est l’un des familiers d’Emmanuel-Théodose, - qui lui versait par ailleurs une pension – et va jusqu’à écrire des vers en l’honneur des duchesses de Bouillon, belle-mère et belle-fille.
Voltaire, admirateur de Marianne Mancini, demandera même à Emmanuel-Théodose d’accéder aux archives familiales afin de défendre la mémoire de Marianne Mancini dans l’affaire des poisons.

Frédéric-Jules (1672-1733)
Surnommé le chevalier de Bouillon, il entre dans l’Ordre de Malte et devient chevalier et Grand-Croix en 1690. D’un tempérament fougueux, Frédéric-Jules a, comme ses frères, des rapports compliqués avec son père, et avec le monde de la cour. Saint-Simon nous dit qu’« il était d’une audace pareille, qui ne se contraignait sur rien, qui disait du roi que c’était un vieux gentilhomme de campagne dans son château, qu’il n’avait plus qu’une dent et qu’il la gardait contre lui ». De nature emportée, on l’accuse également d’avoir frappé à mort un traiteur chez qui il se fournissait. A son caractère hardi s’ajoutent ses mœurs légères. On conserve de lui des lettres adressées à son ami l’abbé Chaulieu dans lesquelles il lui reproche de le sermonner sur ses mœurs. Le duc de Bouillon a bien tenté de le ramener à l’ordre, mais le chevalier de Bouillon, s’en moquant, lui proclame qu’il n’est pas son fils mais le fruit des amours adultères de sa mère avec son amant Philippe de Vendôme. A la suite à cette querelle, il est exilé à Turenne le 23 décembre 1690. De retour à la cour l’année suivante, il se lie avec le grand Dauphin qui lui obtient une fonction dans la Marine royale. Il est nommé capitaine de vaisseau, mais ne prend que rarement la mer, cette charge demeurant avant tout honorifique. Âgé de trente-huit ans, il hérite du titre de prince d’Auvergne, à la suite de son cousin François Egon de La Tour. A la mort de Louis XIV en 1715, le chevalier de Bouillon se rapproche du régent Philippe d’Orléans qu’il suit dans les libertinages. Il est notamment l’inventeur des bals masqués instaurés alors par le duc d’Orléans et ayant lieu trois fois par semaine à l’Opéra,. 
En 1719, il se marie à Olive-Catherine de Trent (1688-1738) dite Mademoiselle Trent, une aventurière irlandaise. Les noces sont l’occasion de grandes festivités qui durent trois jours. De ce mariage naissent trois enfants, tous mort en bas-âge.

Louis-Henri (1679-1753)
Le dernier fils du duc et de la duchesse de Bouillon, le comte d’Evreux, fait une brillante carrière militaire. Celle-ci débute en 1691, par le siège de Mons où le comte d’Evreux est nommé enseigne au régiment du roi. Huit ans plus tard, Louis-Henri est promu colonel du régiment de Blaisois. A la suite de cela, il achète à son oncle la charge de colonel-général de la cavalerie légère. Cependant, pour assumer le coût important de la charge, Louis-Henri décide de s’allier à une héritière. C’est ainsi qu’il épouse en 1707 Marie-Anne Crozat (1696-1729) fille du plus riche banquier de Paris, Antoine Crozat. L’intérêt financier de ce mariage vaut à Marianne Mancini de surnommer ironiquement sa bru le « petit lingot d’or » (Saint-Simon). A la dot de deux millions de livres s’ajoutent des actions dans la compagnie des Indes, apportées par son épouse. Quelques années après, ne connaissant plus de soucis financiers, Louis-Henri tente de faire annuler son mariage, mais sa mère, la duchesse de Bouillon s’y oppose catégoriquement. Louis-Henri se console alors dans les bras de la duchesse de Lesdiguières, sa cousine. En parallèle, sa carrière militaire suit une courbe ascendante, et il devient en 1708 lieutenant-général des armées du roi. Sous la Régence il entre au Conseil, et est nommé gouverneur du Poitou en 1716, et d’Ile-de-France en 1719.

Mademoiselle d’Albret (1696)
Elle est l’enfant du duc de Bouillon la moins connue à ce jour. Elle vie pieusement en résidant principalement au couvent de Port-Royal à Paris.             Elle passe aussi une partie de sa vie auprès de son oncle le cardinal de Bouillon (1643-1715) dans sa maison de repos à Saint-Martin de Pontoise où elle joue le rôle de la maîtresse de maison. 

Louise-Julie (1679-1750)
Connue également sous le nom de Mademoiselle de Château-Thierry, Louise-Julie de La Tour d’Auvergne passe ses premières années au couvent de Port-Royal à Paris, avec sa sœur aîné. Elle se marie le 22 juin 1698 à François Armand de Rohan, prince de Montbazon. Pour cette alliance, le roi aurait doté la dernière fille du duc de Bouillon de 100.000 livres. De cette union naissent deux enfants tous deux morts en bas-âge.
 
 

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