Commode Mazarine attribuée à Nicolas Sageot

Magnifique commode Louis XIV mazarine, attribuée à Nicolas Sageot.
La commode est marquetée de laiton et d’écaille rouge de tortue. Un décor d’arabesques, de feuillages et de figures exotiques apparaissent sur ses panneaux. Le plateau rectangulaire, bordé d’une lingotière moulurée, est orné d’incrustations bérainesques, au-dessus de trois tiroirs longs, chacun avec des panneaux marquetés et deux poignées tombantes. Les panneaux de côtés sont décorés à l’identique, les montants mouvementés s’arquent en volute et se terminent par des sabots en bronze doré.
Epoque Louis XIV
Etat d’usage
Restaurée dans les ateliers d’Henry Collet, expert CNES.
H. 86 x L. 118 x P. 56 cm

115000 €

DESCRIPTION

Cette commode d’exception retiendra l’oeil des passionnés de Nicolas Sageot. Peu de meubles marquetés de cette période pourront se vanter de la finesse et de la qualité indéniable de ses ciselures et de la richesse étonnante de son décor.
Notre commode repose sur quatre pieds en sabots dorés. Elle ouvre à trois tiroirs marquetés à l’identique, présentant un décor feuillagé et d’entrelacs où figurent deux vases fleuries parfaitement symétriques de chaque côté des serrures ; de la même manière une musicien coiffé s’assoit sur une architrave du décor. Les poignées de bronze doré sont tombantes et richement fournie d’éléments floraux comme il est coutume de le voir à cette période.

Le plateau relève quant à lui d’une prouesse de marqueterie : on y identifie en son centre un joueur de luth flanqué de deux amours sous un pavillon supporté par quatre atlantes. Deux personnages de la commedia dell’arte, dans leur cartouche, se font face de part et d’autre du musicien. On relève un décor très fourni à la finesse remarquable, agrémenté d’anges, de masques, d’oiseaux exotiques, de papillons, de vasques fleuries et d’entrelacs feuillagés formant une architecture légère, semée de guirlandes autours des principaux sujets. Les côtés latéraux sont décorés à l’identique avec un cartouche central orné de motifs floraux, de deux masques et de deux lapins.
Le meuble de notre étude présente de très grandes similitudes avec d'autres meubles issus de la production de Nicolas Sageot (1666-1701), notamment les deux commodes attribuées à Nicolas Sageot conservées à la Wallace Collection de Londres, répertoriées sous les références F39 et F408, et deux bureaux Mazarin estampillés dont un présent au Petit Palais (inv. ODUT1500) et l’autre dans les collections royales suédoises, inventorié 215. Concernant ce dernier, on note que le plateau est identique à notre commode.

La décoration en marqueterie est clairement inspirée des travaux de Jean Bérain (1640-1711), l'un des dessinateurs d'ornements les plus influents de la cour de Louis XIV. À partir de 1670, il apparait au service de la Couronne française en tant que graveur et reçoit en 1674 le titre d' Architecte Dessinateur de la Chambre et du Cabinet du Roi, sa mission consistant à fournir des projets de dessins pour les célébrations et festivités. royales. En 1690, il est nommé décorateur en chef des appartements du Louvre en collaboration avec André-Charles Boulle. Ses dessins de meubles, de boiseries et de cheminées sont alors rassemblés dans des recueils d'ornements.

Nicolas Sageot est répertorié comme actif dès 1690, travaillant à la Grande rue du Faubourg Saint-Antoine en 1698. Il travaille comme ouvrier libre avant d'être admis dans la corporation des ébénistes. Sa production comprend principalement des armoires, des commodes et des bureaux, tous décorés de marqueterie d'écaille et de laiton dans le style d'André-Charles Boulle (1642-1732), dont il est devenu le principal concurrent. Nicolas Sageot est également actif en tant que marchand et certaines archives montrent qu'il sous-traite parfois le travail des panneaux de marqueterie à des artisans bien connus tels que Toussaint Devoye (actif de 1706 à 1748). Il est pas rare en effet, à cette époque, que des ébénistes comme Sageot ou Noël Gérard fournissent aux marqueteurs les matières premières qui leurs étaient ensuite retournées prêt à l’emploi (et à être montées sur une caisse). Il semble prendre sa retraire vers 1720.
De nos jours, Sageot est de nouveau mis en lumière aux côtés de son contemporain André-Charles Boulle. Pierre Grand, dans la revue « L’objet d’Art » de février 1993, redécouvre cet ébéniste incontournable de la fin du XVIIe et du début du XVIIIe siècle et permet la réattribution de certaines commodes au maître.
Ainsi, notre commode, d’un luxe peu commun, présente un travail aussi méticuleux que raffiné, alliant un savoir-faire d’exception et une esthétique remarquable.


Source : L'Estampille-l'Objet d'Art, 266, février 1993, p.58, fig.48-70.

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