Marquise en bois doré estampillée Georges Jacob

Marquise en bois doré légèrement incurvée reposant sur quatre petits pieds toupies cannelés. La ceinture de l’assise et la traverse haute du dossier sont sculptées d’une frise de piastres. Les pieds sont surmontés d’une rosace, elle-même surmontée par un grattoir. Les consoles d’accotoirs sont composées de balustres moulurées agrémentées de feuilles d’acanthe. Le dossier est encadré par deux colonnes détachées cannelées surmontées d’un chapiteau à ordre ionique. Le haut du dossier est en forme dit de chapeau de gendarme. 
Estampillée Georges Jacob, et estampillée d’une marque « T » 
Epoque Louis XVI
Restaurations d’usage, garniture moderne, en parti redorée
H. 94,5 x L. 120 x P. 67,5 cm

18000 €

DESCRIPTION

La marquise de notre étude est estampillée par le très célèbre Georges Jacob. Ce dernier est originaire d’une famille bourguignonne d’ouvriers agricoles. Envoyé jeune à Paris, il commence sa formation de compagnon menuisier chez Delanois, menuisier de Madame Du Barry. Il est donc aux premières loges pour découvrir le style néoclassique dont la dernière favorite royale est une grande amatrice. Jacob accède à la maîtrise en 1765. Il pratique déjà à ce moment un style néoclassique sur ses meubles, en parallèle d’une production encore Louis XV assagi. En créant son propre atelier, George Jacob crée ce qui sera l’un des plus grands foyers artistiques de la menuiserie française de la fin XVIIIe. Il reçoit des commandes royales dès 1773, et cela jusqu’à la Révolution, demeurant même après celle-ci l’un des fournisseurs les plus couru des instances officielles. Parmi ses prestigieux commanditaires, nous ne citerons que Marie-Antoinette, le comte de Provence, le duc Charles Théodore de Bavière et des Deux-Ponts, ou même le peintre Jacques-Louis David. Il laisse en 1796 un atelier prospère à ses fils Georges II Jacob et François-Honoré qui fusionnent leurs activités sous le nom de « Jacob Frères ». 

Grace à la biographie du menuisier nous pouvons donc dater notre marquise aisément : c’est-a-dire entre 1765 et 1796, période sur laquelle Georges Jacob appose sa propre estampille. Cependant, pour plus de précisions, nous pouvons estimer notre marquise postérieure aux années 1766-1767, durant lesquelles les supports d’accotoir, jusqu’alors en retrait des pieds antérieurs, viennent de nouveau se positionner à l’aplomb de ces derniers. 

En ce qui concerne l’analyse stylistique et les comparaisons avec la productions de son créateur, voici le résultat de nos recherches. Nous savons que Georges Jacob laisse une importante production de sièges Louis XVI : parmi ceux-ci, la production la plus courante reste celle des sièges à dossier droit que nous retrouvons encore beaucoup aujourd’hui. Les assises à dossier en chapeau de gendarme, tel la nôtre, sont plus rares et n’en sont que plus intéressantes.
 
La renommée de Georges Jacob peut s’expliquer par le soin extrême apporté à l’ornementation de ses sièges. Nous attribuons la paternité de certaines sculptures décoratives à Jacob et à son maître Delanois, notamment les dés de raccordement centrés d’une rosace comme nous en voyons sur notre siège. La sculpture est toujours fine et rigoureuse : notre œuvre le montre par la précision de son décor, notamment sur la traverse haute du dossier qui est godronnée sur son contour et creusée d’un canal en son cœur. Georges Jacob pousse le luxe jusqu’à introduire l’ordre ionique sur les colonnes du dossier, un élément de décor que nous retrouvons sur une bergère attribuée à Jacob et passée en vente chez Sotheby’s au lot 331, lors de la vente du 18 avril 2015. La surface plane est bannie de notre marquise, grâce à des cartouches finement striées sur les dés de raccordement et sur les consoles de la traverse haute du dossier. Enfin, la maitrise technique de l’artisan est visible dans la structure même de notre marquise qui est incurvée, donc d’un bâti plus complexe. Georges Jacob livre d’ailleurs une suite de marquises concaves à Madame la comtesse de Provence pour son pavillon de musique à Montreuil en 1784 (voir lot 12, vente du 13 novembre 2019, Christie’s).

Le bâti à colonnes détachées, plus complexe donc plus précieux, se retrouve dans la production la plus luxueuse de Georges Jacob : le Getty Museum conserve par exemple une suite de sièges avec ce décor (91.DA.15). 

Nous pouvons enfin signaler un canapé présentant la même ornementation est passée chez Christie’s le 22 avril 2004, au lot 638. Un autre est passé dans la même maison le 29 avril 2014, au lot 163, et dont les dimensions sont similaires aux nôtres. Cela arrive souvent dans un atelier, le menuisier utilisant plusieurs fois ses plans pour différentes créations. 

Enfin, un élément présent sur notre oeuvre reste à être analysé. Il s’agit de la marque « T » que nous retrouvons au centre de la traverse avant de notre marquise. Celle-ci soulève des interrogations. D’abord, nous avons pensé à explorer la piste des collections du comte d’Artois (celle du Temple notamment). Or, les marques au feu, très précises, utilisées pour cette destination sont loins de la notre. Puis, nous avons pensé aux Tuileries, mais ses marques ne ressemblent pas encore une fois collées à la notre. Même si cette marque n’a pas pu être identifiée, sa présence montre bien que la marquise vient d’une collection de qualité. 

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